Les régularités de l'environnement permettent de prédire les informations à venir et de s’adaptater en cas d'irrégularité et d'erreur de prédiction. Cependant, la manière dont ces erreurs influencent la perception consciente est mal connu, surtout lorsque les prédictions concernent des caractéristiques visuelles élémentaires (l’orientation, le contraste, les bords: l’assemblage de ces caractéristiques permet la reconnaissance des objets). Nous avons donc développé une nouvelle approche expérimentale avec des objets en mouvement, pour étudier les conséquences perceptives des erreurs de prédiction sur les caractéristiques visuelles élémentaires.
Deux carrés se déplacent l'un vers l'autre. Les participants indiquent si ceux-ci sont en contact ou non avant leur disparition. Lorsque deux objets se dirigent l’un vers l’autre, on s’attend à ce qu’ils se rencontrent. Cependant, ce n’est pas ce que les participants dans notre étude ont signalé. Une illusion forte d'un espace important entre les carrés se produit lorsque les bords de ces carrés se touchent brièvement.
Nous avons mené plusieurs études expérimentales auprès de volontaires sains, et les résultats suggèrent de manière cohérente que l’origine des effets concerne le traitement visuel initial sur les caractéristiques élémentaires des carrés. Les résultats permettent d’écarter une explication en terme de biais décisionnels, d’effets attentionnels ou de masquage. Nous proposons une explication dans le cadre du "predictive coding"; les violations de l'extrapolation du contraste figure-fond ont de fortes conséquences perceptives, comme si le sujet voyait sa prédiction (pourtant non consciente) sur le contraste figure-fond, plutôt que la disparition du contraste lors du contact.
Cette nouvelle illusion constitue un outil pour explorer les mécanismes de prédiction visuelle élémentaire dans l’autisme et la schizophrénie au sein de notre laboratoire.
Pour lire sur l’illusion: https://doi.org/10.1016/j.cognition.2022.105279
Pour lire sur le "predictive coding": https://doi.org/10.1002/wcs.142
Pour lire sur les troubles psychiatriques:
doi.org/10.1016/j.biopsych.2018.05.015
Crédit: Estelle Koning